Nous sommes sortis de la voiture. Nous étions à l’Est de la ville, du côté des usines et du cimetière, sur une éminence où la route fait un virage qui surplombe la vallée et de là on voit une église sur la rive du fleuve, une église de briques et de pierre grise. Lire la suite
rêves
Deux rêves: l’amnésique et le charlatan
L’amnésique
Elles sont plusieurs jeunes filles en fleurs, sur la courbe du pont au-dessus de la gare. Il regarde l’une en s’approchant, qui a la face ronde et parfaitement belle mais comme il s’approche encore, c’est le visage de sa voisine de droite qui attire ses regards, celle-là qui est la dernière du groupe de ce côté et qui s’appuie à la rambarde du pont. Elle qui a habituellement les cheveux frisés les a ici lissés et elle a un peu de rouge aux joues. Lire la suite
commentaire pour “la gare dans les vignes”
Ce morceau essaie de dire l’exil d’une façon en quelque sorte « déterritorialisée ». Le sentiment de l’exil est un sentiment qui m’est familier et qui à certains moments de ma vie, plutôt anciens, m’a saisi de manière poignante. Mais ici le sentiment de l’exil est éprouvé autrement que dans le déplacement de lieu (lequel est néanmoins signifié par l’impossibilité où est le narrateur de partir), il l’est dans l’amitié, dans l’amour et dans la fraternité.
bouchées
Elle me dit, en fronçant les sourcils, « Ne pourrait-on manger un peu plus ? Je n’ai mangé que trois petits bols de riz et j’ai les fesses glacées. » Lire la suite
la gare dans les vignes
Mes nuits étaient douces, mes rêves soucieux, désespérés et doux.
Je les ai ramenés à la gare à travers les vignes. J’aurais voulu partir avec eux mais elle m’en a dissuadé.
Elle m’avait regardé surprise: la petite voiture blanche était garée sur la place devant la gare. Je n’avais rien à leur dire et rien eu à leur dire pendant tous ces jours que nous avions passés ensemble. Je n’avais rien à leur dire, je sentais ce manque en moi physiquement. Nous avions passé plusieurs jours ensemble et maintenant nous n’avions rien à nous dire.
vaches-oriflammes
Le commentaire était un peu irritant par son lyrisme, « Ces vaches-oriflammes, au ventre gonflé vieux bronze, aux doigts mandragores, aux ongles d’or … », mais les images étaient bouleversantes : il se précipitait auprès des monstres atteints (pachydermes ou reptiles géants, triceratops), pour recueillir leur dernier soupir, le gémissement, la dernière larme coulant de l’œil mordoré, pour désigner à la caméra les pattes si étonnamment déliées, les longs doigts. Lire la suite
retour
Pâle soleil de printemps
Pâle soleil de printemps et la montagne
s’effondre envoie des pierres en
pluie tout autour de la véranda
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Céramique
Colonnettes trop minces et deux tons de bleu. Clair. Du sang arabe. Et des carreaux en plinthe sous la fenêtre. Du Delft.
Les hommes déposaient leurs fusils à l’entrée, on amenait les poissons géants du fleuve, roses et bleus, décorés de mayonnaise, l’arête dorsale dressée comme un éventail de céramique.
Sichuan
Nous avons passé plusieurs mois dans le froid, l’obscurité, l’engourdissement et l’inquiétude. Au milieu du continent, loin de tout, à travers des montagnes sèches et des terres grises. Des avions bondés, brinquebalants, trains puants, des femmes cachées dans des châles rouges ou noirs, des hommes avec le couteau à la ceinture. Avec toujours le souci de notre bagage. Nous avons dormi dans des salles communes, des dortoirs, nous avons dormi dans des salles d’attente agglutinés avec les autres près du poêle de fonte, sous la lumière jaune des lampes à pétrole dans des auberges de bois clair.