fracas des merles

Au point du jour lorsque le monde est bleu
sous le fracas des merles à gauche à droite ici
au fond de la vallée déjà là-bas
en bas les moteurs grondent et se hâtent
si tôt vers le travail

phares allumés dans le
petit jour comme ruisseaux
vers le fond
de la vallée convergent

Pluie

J’avais entendu plus tôt dans la nuit cet écho de coups lointains mais je n’y ai d’abord pas fait particulièrement attention, j’ai supposé que c’était E. qui tapait quelque chose en basprès du feu. La pluie s’était mise à tomber vraiment fort. Je me suis réveillé à 3:55 (ou 2:55? je n’avais pas encore mis mon portable à l’heure d’hiver). Envie de pisser. Bandant et avec l’envie de pisser. J’ai pissé et je me suis recouché. À nouveau ces coups, plus forts, ils m’ont empêché de me rendormir. Alors me suis levé, j’ai fait le tour, je suis descendu. J’ai supposé que ce pouvait être la porte de séparation du salon, l’ai ouverte, suis rentré dans la pièce (sombre, où n’était plus E., sombre sauf les reflets de ce qu’il restait de braises vives des deux grosses bûches mises en début de soirée) et j’ai vu l’eau qui avait couvert le sol de l’office et avait débordé jusque dans l’entrée. J’ai pris le balai de pont. J’ai poussé le plus d’eau que j’ai pu par la porte de la cuisine. La pluie s’était calmée mais la queue de la tempête annoncée était arrivée et le vent secouait les arbres. Les chats me regardaient de sous le fauteuil en osier dans la cour. J’ai poussé l’eau dehors comme j’ai pu, pieds nus. Le sol devant la cheminée était chaud et agréable sous les pieds. Pour le reste il ne faisait pas froid. Puis je suis remonté me coucher. La pluie entretemps était revenue, violente et agitée par le vent. J’ai fini par comprendre que les coups que j’entendais sous mon oreiller étaient le bruit fait par un battant de la fenêtre entr’ouverte contre la crémone sous quoi je l’avais coincé. J’ai fermé la fenêtre. La pluie cognait sur les tuiles. J’ai écouté la pluie, dans la diversité du bruit il y avait quelque chose de proche, un impact de goutte proche et j’ai enfin repéré une gouttière, de l’eau que le vent poussait sous les tuiles au-dessus de ma chambre, sous la poutre faîtière, au-dessus du fauteuil. Dans ma hâte à ôter la lampe de sous le goutte-à-goutte, je l’ai faite tomber et son abat-jour en verre a fini de se briser. J’ai arrangé les choses comme j’ai pu, cherché une bassine en bas, etc. et j’ai fumé une cigarette. Le portable a sonné à 7:00, je me suis rendormi (mes morceaux de sommeil de la nuit ont tous été délicieux) et me suis réveillé pour de bon (cela faisait un bon moment que je ne dormais plus profondément) à 9:40. Habillé tout de suite pour prendre la voiture avec l’idée de déjeuner à la Pointe. En bas l’eau était revenue et s’étalait devant la cheminée jusqu’à la salle à manger. E. a pleuré.

les oliviers

Les nuits étaient froides et longues, novembre, et la journée d’aujourd’hui il avait plu par longues averses violentes. Depuis le point du jour la radio était allumée, en bas, entre la cuisine et la salle. Le ciel s’était ouvert autour de midi et nous avions mangé dehors. Les pierres de la terrasse restaient mouillées, retenaient de minuscules flaques d’eau et tout autour près des crêtes d’immenses nuages noirs attendaient de se rejoindre et d’occuper à nouveau le ciel. Lire la suite

dans les ruines

Allongé dans la chambre que je me suis faite au sein des ruines, je fume une cigarette et je regarde la lumière d’un pâle soleil s’épandre sur ma couche. Il a plu tous ces jours-ci et le ciel reste menaçant. Le soleil cependant perce aujourd’hui, quelques longues plages, le plus souvent à travers une nappe blanche de nuages, et ici de plus entre les branches d’un petit arbre qui pousse non loin devant ma fenêtre. Après les fatigues de ces derniers jours (mon arme est posée droite à un angle des murs), ce moment est très doux. Tout affaibli qu’il soit le soleil réchauffe le pan de mur humide. Et je lève la tête vers la voûte au-dessus: ces gens-là savaient vraiment bâtir, nous, barbares, ne saurions pas mais nous aimons vraiment nous installer dans les ruines, nous y aménager un rapide confort. Ma cigarette se termine. Mes doigts étaient trop gourds, hier, pour que je puisse rouler, jusqu’à ce que nous allumions un feu au milieu de l’église.

dit Risso

Quatre étages dit Risso
On n’en sait pas assez
Au bord de la mer il doit y avoir quelqu’arbre
des pins et puis? Il y a les palmiers
non loin derrière les plages plantés
qui pensent à plus loin au-delà
les succulentes, le jardin sous la corniche,
aloès, cactes et la figue de Barbarie.
Et derrière, les aigrures, citrons et oranges
qui sur les trottoirs de Menton
im dunklen Laub glühn
comme des lampions et le kaki
ou plaquemine et le néflier pipa
du Japon pas celui de Belgique.
Et, plus haut, l’étage des arbres de l’Eden,
des terrasses, de l’olivier,
de l’amandier et du figuier
(qu’on m’apporte, disait Épicure,
un petit fromage frais que je fasse bombance)
et le cerisier de l’idylle,
un soir d’été dans un fauteuil de toile
à écouter les oiseaux.
Et, plus haut, où l’homme se retire
sapins, cèdres et mélèzes, etc.,
l’encre et les chemins.
Et plus haut encore, plus haut presque plus rien,
la caillasse, la lune et les lacs nus, ce qui menace.