Des villes, je les porte en moi comme des dessins, des maquettes, réductions ou algorithmes, prêtes à s’ouvrir sous mon regard aveugle, mon aveugle regard vers le dedans, vers ce grenier de ma mémoire où il avance comme dans le faisceau étroit d’une lampe torche parce qu’il n’y a jamais été installé d’électricité. Villes qui sont là, dans le grenier obscur de ma mémoire, en attente de lumière, lumière du souvenir et de l’effort.
anamnèses
En arrivant dans cette maison…
En arrivant dans cette maison – je n’y étais encore installé que par un matelas futon posé sur le carrelage de la pièce qui serait ma chambre – je me suis dit que j’emménageais au Paradis sans le mériter, de sorte que je me suis senti l’habiter en étranger, en métèque, autorisé à en jouir des délices que de manière limitée, par tolérance et en fonction du travail que je fournirais à son profit.
Lire la suiteL’image des tours
Ma première mission en Azerbaijan, en novembre 2001, je crois, c’était peu après les Twin Towers.
On avait regardé les images des tours, des avions, des éruptions de fumée sur ce ciel bleu, cette lumière nette, dans un bar au-dessus d’un terrain de tennis, à Bordighera ou San Remo, au-dessus de la mer, sous un ciel aussi bleu et aussi net. Nous avons regardé ces images à l’intérieur, nous étions entrés boire un café. Lire la suite
dans l’avion, en écoutant Prokofiev
Sous un ciel bas et lourd
Sous un ciel sombre et bas
Promenade sur une pente mouillée
Les gouttes de la dernière averse pendent en-
core aux bords des feuilles
Deux tours de briques
Anciennes et demi effondrées
On parle d’un grand groupe
En bas dans la rivière des iscles
de galets et de sable
Gris et jaune
Iscles et plages
Squares de Paris
Dans les squares de Paris, je détournais les yeux de ma lecture pour observer les manœuvres des pigeons: les dandinements obstinés des mâles, les évitements gracieux et exaspérés des pigeonnes. C’était un petit bonheur et peu importait qu’il fût petit.
les psaumes
Une place couverte d’herbes devant notre très vieille église badigeonnée de chaux blanche. Notre religion était brouillonne et délabrée. Un vague mélange de morale et de superstitions. Lire la suite
Tundla Junction
Tundla junction – 15 mars 1996
Le cyclo-pousse, à Agra, avait voulu que nous repassions par l’échoppe de son « boss ». Lire la suite
Arles, appartement
Nemo à Mathura
(Nemo m’accompagnait, il m’a accompagné pendant tout ce trajet. Il m’a accompagné secrètement, caché de moi. Ce n’est qu’aujourd’hui, une fois rentré à Nice, à Nice que le gris du ciel, la petite pluie fine, rend plus européenne encore, ce n’est qu’aujourd’hui que je l’entrevois, que je le remarque, comme une ombre, un double, un décalage de moi-même. Un fantôme, une présence plus qu’une forme.
Il attendait la fin de l’après-midi, lorsque la chaleur fléchissait, pour aller se promener sur les quais.) Lire la suite
terrasse à Udaipur
Sur la terrasse d’un hôtel et le palais brillait dans le lointain et semblait dans la nuit une gigantesque pièce de joaillerie. Soni au milieu de ses garçons, ils mélangeaient du gin et du Thumb’s up. Ils se passaient la cigarette blonde à bout filtre que l’un d’eux avait allumée. J’étais là, moi, au milieu, je mangeais lorsqu’ils ne faisaient que picorer et je buvais de la bière. Et je les regardais, hébété et ignorant, voyageur, fatigué aussi et détaché.