- Distances … Voie lactée
- Sie gleicht einem ewigen Nebelstreif
- den eine schwache Helle durchschimmert[1]
- Lorsque du haut de ces montagnes
- ou sur l’eau lisse par une nuit sans lune
- Le monde est plein de dieux
- et il n’est de sens que moral
lyrismes
jardins minéraux
le soleil est chaud mais le vent
agite les feuilles des orangers
derrière la vitre sous le froissement
des palmes leur mouvement a
le son métallique des jardins anciens Lire la suite
Noh (Ezra Pound 1916)
Mais la gloire du monde n’a qu’un temps. Elle vient en son temps, souffle et s’enfuit.
Ainsi pour lui.
Cherchant un endroit où vivre, il alla vers Azuma, voyageant comme un morceau de nuage. Il posa le regard sur les vagues de la mer à Ise et dolent il songea à son année de gloire : « Pourquoi les vagues, les brisants reviennent-ils ? »
Ainsi pensif il se tenait au pied d’Asama et il voyait la fumée du soir s’enrouler dans le ciel.
arbres
(Je parle de villes mais ne les nomme pas
le fracas d’orage des roues annonçait entre les hauts murs
des rues sans trottoir l’arrivée d’un véhicule
et il faisait froid encore dans l’ombre des rues même si
le ciel en haut mais il fallait lever les yeux
le ciel en haut limpide et bleu)
L’été finit, ce que je ne pensais pas revoir
de certains érables déjà les feuilles
jaunissent ou roussissent dans les quartiers ouest de la ville
devant les maisons sur certains arbres
les pointes des feuilles déjà doucement s’embrasent
je m’en vais et indifférents les arbres
comptent et mesurent et doucement s’embrasent
au moment fixé par leur calcul
chacun calculant pour son compte
le calcul de chacun
les arbres, l’un à côté de l’autre, chacun
fait son calcul les oiseaux comptent aussi et mesurent
chacun selon son espèce frémit et s’apprête ou s’élance
vers le sud, où fleurit le citron les arbres chacun selon son calcul l’oiseau de l’oeil perçoit le
frémissement de son voisin
La nuit arrive tôt, la nuit est froide
je referme les petits carrés de fenêtre que je laissais ouverts
jour et nuit la pluie est froide les
mouches reviennent mourir dans la cabane de bois qui protège mon entrée,
en haut de l’escalier. Et moi je ne sais pas calculer, il me
faut tous les indices et je ne peux me persuader que
l’été finit je sais que je m’en vais, à peine
Ton visage est un écroulement
Si je levais sans cesse mes yeux, si j’envoyais sans cesse mes yeux à droite à gauche, c’était moins par crainte de manquer son apparition que pour la susciter.
Ton visage est un écroulement, c’est pourquoi j’aime ton visage et pourquoi je défaille en sa présence. Il est comme l’écroulement de hautes colonnades, non pour se précipiter à terre mais pour basculer dans le vide.
Pourquoi ce ciel d’orage à ton approche
Pourquoi ce ciel d’orage à ton approche et pourquoi ce roulement de tonnerre? Qu’est-ce qui fait pencher la terre devant ton pas? Pourquoi cet assourdissement et pourquoi ton visage ne déchire-t-il que moi? Ceux-là autour, ne viens-je pas tout juste de les voir s’enfuir en levant les bras ? Ne les ai-je pas aperçus comme des animaux timides se cacher vite? Or l’instant d’après tandis que je reprends souffle, éperdu comme le naufragé, je dois les voir vaquant comme ils étaient lorsqu’on ne faisait que t’attendre. Quelle terrible nécessité les force à cette comédie?
Ce ciel noir, pourquoi à ton approche? et ce roulement de tonnerre, pourquoi?
Pâle soleil de printemps
Pâle soleil de printemps et la montagne
s’effondre envoie des pierres en
pluie tout autour de la véranda
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une vallée
Comme un sac placentaire ou comme un poumon la vallée est accrochée au village qui en surveille la bouche. Mais toute la vallée dans un cristal, prise dans l’air de ses crêtes, toute la vallée est dans une limite précise et idéale. Et plusieurs de ces villages qui dominent, de formes nettes, les routes, ils ont auprès d’eux la respiration et le monde. Le cercle du jugement, le profond comme le clair. Et l’idée est le regard de l’unique, l’enthousiasme saint.
L’obscur et la lumière une fois encore se composent, où l’air est comme une gelée traversée d’or, dessinée d’or fin, et les branches arrêtées.
Mais chaque divine bête, chaque vie miraculeuse, chaque monstre qui tremble ici, chaque divine bête, la grande au souffle rauque et dont le dos se plisse d’une volonté de routes tendues, un regard est au-dessus d’elle qui la pèse. Ainsi devant mes pieds des trous d’ombre s’ouvrent, des voies impossibles, et même si de loin la nuit régit ma course, la journée d’automne est comme une journée de printemps. Parce que l’hiver s’annonce comme un pardon et que ce n’est plus la mort mais la vue seule.
Ces chemins sont mes bronches et mes pieds sont mes yeux, le ciel tout entier est mon œil et le soleil ma pupille. Moi, l’arpenteur, ai sur le dos un chevalet mental, mon gnomon, mon moyen de transport. Cette seule journée a la figure d’une vie entière.
J’ai rêvé cette nuit de la montagne comme d’un palais immense à forme de montagne, tout entouré de néant et de nuit. Quoi, dans ce rêve, refuse et s’acharne? Chaque rocher une chambre, chaque falaise une salle et chaque pierre un degré. Étagées sur la pente, aveugles et têtues, complètes et bornées, combien de vies?
Giovanna
l’herbe épaisse et tendre
un plan et un soleil qui semble neuf et l’arc
tendu d’un arbre en fleurs
aussi une ombre mélangée un tamis de lumière
je m’étonne
une annonce
à nouveau ?
mais
Giovanna Giovanna ton pas
glisse à nouveau sur la dalle ou le pré émaillé
Giovanna pauvre ombre, pauvre et belle, belle et pauvre lumière
retournerais-tu ?
ton pas glisse ton pied nu
dédaigne, innocente, pierre aiguë, épine, branche et serpent glisse comme ce nuage bientôt noir là-haut
le village que le soleil fait luire comme une vieille armure
le village rose et gris glisse sur le plan d’herbe et le versant opaque et noir comme sont les cyprès et ton profil qui se perd. Est-ce ça
qu’il m’en faut entendre, que les amis d’où tu viens se lassent de m’attendre ?
se dissipent peu à peu se dispersent et s’en vont
parce que je ne sais plus peindre
galère
vaste pont devant, galère ou pétrolier, ce vaisseau transporte un jardin, voilà, invraisemblable mais c’est ainsi, tapis-paradis de Perse sur l’étendue bleue de la mer, les plus délicates essences et variées
et lorsque la tempête se lève, il faut voir, attention ! faut voir s’agiter les esclaves jardiniers, bruns et maigres, nus, en pagnes comme des couches, s’agiter, courir en tous sens sur le pont, amarrer, relever, ré-amarrer les vasques
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