Vers Palerme (3/4), Naples – Messine

21.08.2000 – Villa S. Giovanni – Originally uploaded by cercamon

10:45.- Salerno. Pour ce que j’en vois de la fenêtre du train, le paysage du bord de mer a une allure franchement ligure, pas exotique, ce qui confirme ce que j’ai souvent ressenti: que l’Italie qui nous est immédiatement voisine est beaucoup plus méridionale que ne l’indiquerait sa situation géographique. Les immeubles qui montent sur la pente, les couleurs.

Je n’ai pas eu cette impression de familiarité dans le sud immédiat de Naples.

11:00.- Repartons. Un costaud bronzé, aux larges mains, gourmette dorée et chemise bleue, vient de s’asseoir à ma gauche et ouvre un livre:La Pesca sportiva in mare, l’ouvre à la première page, le lisse du bord de la main et commence à lire. Fume des Marlboro.

13:00.- Paola. Déjà l’impression que ce qui aura été écrit sera futile en comparaison de ce qui ne l’aura pas été. Aussi déjà le besoin de prendre distance par rapport au journal pour poser des priorités. Par exemple ne pas perdre de vue mes personnages pour ne pas sacrifier ce que je tiens.

Ainsi à Paola sont descendues les deux napolitaines, la muette et sa fille, qui vont à Cosenza. Le costaud pêcheur s’est assis en face et à sa place s’est assis un jeune homme, avec une barbe de quelques jours, un t-shirt blanc sans manche, un bandana sur les cheveux et une petite croix de bois en T autour du cou. Il a demandé deux fois si le compartiment était bien fumeur et de seconde, ce qui dans les deux cas sautait aux yeux. D’autres jeunes backpackers remontaient l’allée, une fille avec une croix de bois au cou. « Ay, giubilando! » a-t-il lancé en levant la main. Et puis a allumé une cigarette (Diana) et ouvert le petit livre qu’il tenait serré dans sa main, commencé à lire, ce qu’il fait à présent: les Evangiles!

13:20.- Falerna. Les collines avec leur herbe brûlée et les points noirs des yeuses donnent au paysage un air de Californie. Il fait très chaud maintenant dans la voiture, toute climatisée qu’elle soit.

Nous sommes passés de Campanie en Calabre pendant que je déjeunais. Ici une sorte de large vallée.

Le wagon-restaurant (self), à cause de l’atmosphère (moite), à cause des odeurs, à cause aussi de certaines particularités de procédure (le café: je le paie avec le repas et l’employé me donne le petit sachet à ramener à la fin du repas et à mettre dans le percolateur pour avoir le café) me rappelle l’Inde. Il faudrait qu’à un moment ou à un autre je fasse le point sur ces rappels qui doivent peut-être plus à ce qui ne s’y trouve pas (une certaine implication) qu’à ce qui s’y trouve.

(13:30.- Arrêt à Lamezia Terme.)

Le repas: salade de tomate (une tomate coupée en quartiers et arrosée d’huile d’olive, simple et bon, des fettucine aux petits pois, crême, fromage et un peu de viande, un petit pain, une mini bouteille d’eau gazeuse, une petite bouteille de vin et un café. 15 000 £. Voisins: un jeune homme brun, joli garçon, type italien méridional (petit nez, cheveux bouclés, drus), et une femme, autour de 55 ans, peut-être un peu plus, Française, qui lui cause, beaucoup, en français, comme si elle prenait ses intérêts à coeur. Il travaille à Paris, dans la restauration, parle français mais pas très bien. Plusieurs fois il se tourne vers moi pour me demander en italien un renseignement, la température à Palerme, etc., qui vient alimenter sa conversation avec la Française. C’est lui qui me demande, comme la côte a changé, s’est faite plus abrupte et sauvage, plus belle aussi, plage de sable gris sombre, criques, plages, îles, si nous sommes déjà en Calabre. La Française va à Palerme, une amie enseignante lui prête un appartement, question aussi d’une école de plongée sous-marine, dit qu’elle va maigrir, semble un peu inquiète, dit que s’il fait trop chaud, elle ne restera pas.

Pendant le repas je lis le journal, la Repubblica achetée sur le quai à Rome en attendant que l’arrivée de mon train.

14:30.- Villa San Giovanni. Une baie que les ferries traversent, pour Messine.

Beh, non, c’est déjà la Sicile que j’ai ici en face et ce n’est pas une baie mais le détroit de Messine. Simplement nous allons devoir descendre, si j’ai bien compris, jusqu’au bout de la Calabre, Reggio.

Non, encore: c’est ici qu’on embarque. Pendant que j’étais aux toilettes (pas d’eau! j’ai les mains poisseuses de savon) le train a été amené dans le bateau. Il est quinze heures.

21.08.2000 – Détroit de Messine – Originally uploaded by cercamon

15:45.- Messine. Voilà, la traversée est faite. Retourné dans la voiture où il fait toujours chaud même si la climatisation s’est remise en route. Le soleil tapait fort de toutes façons en haut, sur les ponts.