Baker Street

En milieu de soirée, vers les dix heures, comme nous finissions nos cigares, la conversation se fit languissante. De son fait, m’a-t-il semblé – et la suite l’a plutôt confirmé. Il parut tout à coup plongé dans une méditation intempestive. Il considéra la cendre de son cigare le visage soudain ouvert et rêveur, hochant lentement de la tête puis il déposa ce qui restait de cigare sur le cendrier et se leva décidément. En me souriant il me dit qu’il montait se coucher mais que cela ne nous chassât pas (j’avais la veille excessivement loué le cognac qu’il nous avait servi). Et que si nous avions besoin de quelque chose, le maître d’hôtel n’avait pas l’habitude de s’endormir tôt et avant minuit nous étions sûrs de le trouver éveillé. Se tournant vers le docteur puis brièvement vers moi, il nous souhaita une bonne nuit. Nous l’entendîmes monter l’escalier. Le docteur nous resservit à chacun un cognac et je lui dis que j’avais trouvé au grand homme l’expression de quelqu’un qui vous quitte pour aller retrouver une femme. « Plus la mélancolie. » fit-il en reposant le flacon sur la table basse et je l’approuvais en silence. « Il y a bien une femme, reprit-il, mais c’est la vieille Annamite toute fripée qui a été sa nourrice et qui couche dans une petite chambre toute étroite à côté de la sienne. C’est là qu’elle lui prépare sa pipe d’opium vespérale. Il reste parfois un peu chez elle à causer en vietnamien puis il rentre dans sa chambre qui communique directement avec celle de la vieille. »

Une réflexion sur “Baker Street

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