le jardin de Fluski

Un jour Freu dit à Nemo: « Vous n’êtes pas sorti d’ici depuis que vous y êtes arrivé, non? » Je le reconnaîs, oui, c’est curieux, c’est combien de temps que je suis ici? Un mois, non, plus que ça, deux mois. « Ce sont trois mois et un peu plus que vous êtes ici. » Je ne suis jamais sorti, c’est vrai, je ne m’en étais pas rendu compte. Je regarde la ville depuis les pavillons, je la regarde de l’autre côté du fleuve, je regarde le chemin qui mène aux berges, je regarde les maisons, les cours, les arbres, je regarde plein de désir la ville de l’autre côté du fleuve mais il ne m’est jamais venu à l’idée de traverser le pont. Je regarde les tours, les dômes et les flèches, je regarde les temples et les salles de prière, et le palais. J’entends les troupes de danseurs dans le lointain, je désire m’approcher, écouter la musique et voir les danses mais il ne me vient pas à l’idée de sortir des limites du parc.

Trois mois, je ne croyais pas tant. Il est vrai que… et je désigne d’un geste du bras les carnets que Freu a posés sur la table. Et comme quelques minutes auparavant il y avait cherché un extrait de nos entretiens qui lui était revenu à la mémoire mais qu’il n’avait pas su exactement situer, il y avait plusieurs carnets sur la table ronde de la chambre, cinq, et deux d’entre eux étaient ouverts, posés face ouverte contre la surface de la table. Si vous saviez combien il est curieux, certains jours de redescendre de cette chambre dans le jardin, de revoir les palmiers et la pelouse sous les palmiers. Vous savez, pendant les deux premiers mois de mon séjour ici…

C’est comme si ce jardin était le monde, et qu’au-delà de ce jardin, c’était un autre monde. Mais vous sortez, vous, souvent? Je ne vous vois jamais sortir, ni Ducat, ni Fluski. « Nous sortons pourtant, il est vrai pas très souvent. »

Je lui avais demandé de le faire la première fois et toujours ensuite lorsque je m’installais dans la pièce, Freu tirait les contrevents à persiennes de sorte que nos séances eurent toujours lieu dans la pénombre. Aussi lorsque je retournais au pavillon la lumière du jardin m’éblouissait.

Une réflexion sur “le jardin de Fluski

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