Lolita

Lolita. J’ai dû m’en arracher vers 15:00. Et un état d’esprit produit par l’histoire, en un moi déjà trop prêt pour ça, tandis que je marchais sur les trottoirs de l’avenue. Je me suis assis au Café de Lyon, un lien serré entre mes yeux, alertes, et mon cœur. J’ai soudainement fermé le livre et laissé la table pour suivre une grande jeune fille rousse, américaine, grande et bien nourrie, dans un chemisier noir et des jeans (et la façon dont ses jeans ne collaient pas exactement à ses fesses disait immanquablement, pensais-je, son origine), et surtout pas les cheveux roux-orange mais une variété plus sombre, avec des nuances de ciel mourant.

Elle était accompagnée d’un couple vieillissant, ses parents, ai-je supposé, mais sans ressemblance avec elle, sinon leur évidente américanité. J’ai eu un peu de difficulté à remettre le livre dans la poche trop étroite de ma veste et j’ai cru les avoir perdus mais ils s’arrêtaient souvent devant les vitrines des magasins de mode et sa chevelure écarlate me la signalait à travers la foule de sorte que j’ai pu facilement les rejoindre. Comme je les dépassais, elle a tourné la tête vers mes regards: ainsi que je l’avais supposé en la voyant dans le coin sombre du café, assise entre sa vieille mère et son vieux père, son visage était parfaite beauté, couleur et forme. J’ai traversé l’avenue éperdu et j’ai envoyé un dernier regard, sur leur dos devant une autre vitrine de vêtements, encore dans mes yeux la vue toute proche et rayonnante prise un instant avant.