chahut

Il ne comprenait pas, bien une heure que ça durait ces cris dans la cour, et c’était bien la première fois que ça arrivait. Des cris de dispute, des rires forcés, des stridences de voix de fillettes, au moins une heure que ça durait, ça avait interrompu sa sieste et maintenant il n’arrivait pas seulement à lire un livre. Alors il est sorti sur le balcon et s’est mis crier à son tour, les deux mains agrippées à la balustrade: « C’est pas un peu fini, ce bordel? » surpris par la colère qui lui était venue d’un coup.

Ils étaient cinq gosses, deux fillettes et trois garçons, le plus vieux avait douze ans, à tout casser. Ils sont restés un moment figés et muets de le voir surgir ainsi comme un diable de sa boîte, puis un petit l’a apostrophé: « Baise ta mère, baise ton père. Nikoumak, nikabouk » les autres alors de rire et de reprendre en chœur « Baise ta mère, baise ton père ». « Madame Touati, qu’est-ce que c’est que ces gosses? » il a crié « Madame Touati! Madame Touati! ». Mais personne ne répondait et les gosses de scander de plus belle, à s’en faire péter la voix « Baise ta mère, baise ton père ».

Ils se sont mis à lancer des cailloux. Alors il est rentré dans sa chambre, a pris sa canne et a descendu l’escalier. En bas, il a remarqué que la porte sur la rue était ouverte, grande ouverte, ce qui n’arrivait pour ainsi dire jamais. Il s’est avancé vers les gosses, la canne horizontale, le bras le long du corps. Les gosses s’étaient tus et le petit avait une sorte de rictus ou de rire nerveux.

Les filles gloussaient.

Le plus grand a essayé de s’enfuir mais il l’a attrapé par le bras. A ce moment quelqu’un est sorti de l’ombre, un adolescent en uniforme.

Son sourire révélait des dents gâtées sous une moustache naissante.

Son visage ne lui était pas inconnu.